Qu’on ne vienne plus dire que le genre littéraire du roman de science fiction est vide ou futile ! Le roman Défaite des maitres et possesseurs de Vincent Message est une belle nouvelle preuve du contraire…Malo, un interstellaire travaille dans un ministère et fait partie d’un comité d’éthique. Il a une « femme de compagnie », Iris, qui blessée risque l’élimination vu qu’elle n’appartient pas à la catégorie supérieure des humains au service de la nouvelle espèce qui a la main mise sur la Terre. Malo s’est attachée à elle et doit se battre contre les siens pour essayer de la sauver.
Dans ce roman d’anticipation, de science-fiction, ou encore dans ce que l’on pourrait qualifier de « fable écologique », les hommes sont dominés par des extraterrestres et sont traités de la même façon qu’ils ont eux-mêmes traité les animaux ou encore les races qu’ils estimaient inférieures. Les nouveaux dominateurs font le procès sans concession du monde antérieur si peu respectueux de la nature, si peu soucieux de la préservation des espèces en voie de disparition ou encore de la maltraitance des animaux, si peu préoccupés par la fin de vie de leurs aînés ou des handicapés jugés « inutiles ». Mais les dominateurs du futur ne sont pas meilleurs. Leur individualisme et leur souci de l’argent prime dans tous leurs combats. La question posée par l’approche de cette société sera alors celle du lien et celle du respect d’autrui. Malo est un des rares de son espèce à être interpellé par cet égoïsme généralisé et est prêt à s’engager tant en politique que dans sa vie personnelle pour défendre cette cause.
Difficile pour le lecteur de ne pas sentir renvoyé à lui-même et à sa responsabilité personnelle et collective face au monde que nous habitons. Refermer le livre et se l’être approprié, c’est décider de réagir, de s’engager et de ne pas capituler. Petit bémol à la partition : dans une fable, la morale est extérieure au texte symbolique, voire totalement absente : au lecteur d’en dégager lui-même la réflexion. Ici, l’auteur est parfois tenté de nous livrer directement sa critique et son inquiétude écologique, sans images ni filtres. Ces pages-là s’apparentent alors plutôt à un essai. Mais quoi qu’il en soit, le sujet est important et bien traité et l’auteur réussit à nous interpeller. Il porte bien son nom…
J’ai apprécié:
- le regard extérieur posé sur les résultats de notre civilisation et le renvoi miroir de ce que nous avons imposé à d’autres avant d’être nous-mêmes dominés
- les multiples questions éthiques posées dans ce roman
- le plaidoyer pour les plus faibles, riches d’humanité
Et puis, vais-je manger encore autant de viande après cette lecture ? Pas sûre….
Il y a, pour résumer, trois catégories d’hommes : ceux qui travaillent pour nous ; ceux qui s’efforcent de nous tenir compagnie ; ceux que nous mangeons.
Penser pour eux (= les hommes) c’est découper. Trier. Faire entrer les choses et les êtres dans des catégories qui une fois refermées repoussent les nouveaux arrivants.

Vincent Message