Au vu du titre, L’Annonce avec un A majuscule n’est pas celle que l’on croit ; il s’agit simplement une « petite annonce » dans le journal qui, parce qu’elle a été postée, parce qu’elle a été reçue, donne une nouvelle perspective à un homme, à une femme, à un enfant. Pour lui, c’est celle de rompre avec le refus de siens de se projeter dans le futur ; pour elle, c’est celle de recommencer ailleurs et offrir à son fils un nouveau départ loin d’un passé lourd avec un père violent et addict à la drogue et l’alcool.
Annette quitte donc la ville pour s’installer dans le Cantal et apprivoiser progressivement la vie à la campagne, tantôt aux paysages ouverts à perte de vue , tantôt aux mentalités fermées telles qu’on les devine souvent dans le monde rural. Le couple aussi s’apprivoise et si les mots ne sont pas son meilleur langage, les cinq sens et le non-verbal tiennent toute leur place dans cette mise en confiance progressive. Eric s’adapte également, plus facilement à la nature et aux animaux qu’aux humains parfois hostiles à l’intrusion de cet enfant dans leur monde, mais toujours avec la même sensibilité que Paul et Annette.
Un très beau roman signé par Marie-Hélène Lafon à l’écriture poétique, délicate et suggestive. Ces implicites, à l’image du monde rural peu bavard, sont quant à eux suggérés dans un vocabulaire riche et soutenu … en guise de contrepied, pourrait-on dire ? L’humour n’est pas absent non plus pour décrire des tableaux cocasses de scènes du quotidien à la campagne.
J’ai aimé
- le rôle important réservé aux lieux : la ferme au sommet du village, la grange réaménagée par Paul pour son nouveau couple, les 3 grandes fenêtres qui donnent sur la campagne au fil des saisons, …
- les différents caractères bien trempés des membres de la famille de Paul
- l’épisode de la lecture du journal, de la Dyane, de la sortie du dimanche, de l’enterrement,… Lisez, vous craquerez 😉
- cette lecture dense d’une petite perle qui m’a plongée dans un monde rude mais empreint d’extrême sensibilité grâce aux trois protagonistes.
Dans le bois de la montagne, Eric et Lola (le chien) avaient trouvé un coin pour eux, par hasard, pendant le deuxième printemps. Au début, Eric n’allait pas dans les bois ; ensuite, il avait appris, de la fenêtre de la grande pièce qui était son poste de vigie, à deviner les chemins dans les serrés des ramures ou entre deux parcelles. Il annonçait, on part, on savait que c’était avec Lola.
A Fridières, sans qu’Annette songeât à s’en étonner ou à le regretter, Paul avait laissé les lieux et les odeurs, le vide, les visages, les gestes parler pour lui. On avait peu à dire quand il fallait d’abord vivre ensemble, le matin le soir, se toucher, s’attendre, se craindre, s’apprendre.
Ce roman paru en 2009 est édité en poche chez Folio. Marie-Hélène Lafon vient de sortir chez Bucher Chastel un nouveau roman intitulé Nos Vies, je me suis empressée de l’acheter. Je vous en donnerai bientôt des nouvelles !

Plaisirs de lire – l’Annonce Marie-Helène Lafon